Edmond Fortier, né français en 1862 à Celles-sur-Plaine dans les Vosges, devenu allemand par le fait de l’histoire, émigre à Paris en 1883, se fait naturaliser français puis s’installe, à la fin du XIXe siècle, à Dakar, où il développe son talent de photographe. Il y meurt en 1928. Actif au début du XXe siècle en Afrique occidentale, il a légué un important héritage photographique de plus de 3 500 clichés, édités sous forme de cartes postales, genre à la mode à l’époque. Ses cartes postales ont essaimé à travers le monde, alors que les originaux n’ont pas été retrouvés à ce jour.
Aucune étude d’ampleur n’avait encore été consacrée à ce personnage. Daniela Moreau concentre son attention sur un moment particulier de la trajectoire d’Edmond Fortier : le périple de plus de cinq mille kilomètres qu’il effectua du chef-lieu de la Guinée française à la porte du désert, Tombouctou, dans l’actuel Mali. Cet axe principal est quelquefois délaissé pour des chemins de traverse, notamment vers la falaise de Bandiagara et le pays dogon. Edmond Fortier est le premier à avoir photographié certaines cérémonies et danses du pays dogon et de la région de Bamako, montrant notamment des porteurs de masque à antilope ciwara, mais aussi la variété des instruments de musique. De même, Fortier nous donne à voir l’état délabré des mosquées Sankoré, Djinguereber et Sidi Yahya de Tombouctou avant leur reconstruction. Fortier n’endosse pas pour autant le rôle de l’ethnographe, même amateur, mais il exerce son métier avec talent, faisant de son œil un outil perspicace d’observation.
500 cartes postales, rassemblées dans la « collection générale Fortier », illustrent ce voyage. Une bonne moitié d’entre elles sont ici reproduites. C’est à leur analyse que se livre Daniela Moreau, après avoir étudié ce personnage hors normes et s’être interrogée sur le contexte technique et historique de la production iconographique, grâce à un minutieux travail de recherche, alliant exploitation de fonds d’archives et d’une vaste bibliographie, mêlant érudition et investigation.
Première édition en brésilien de cet ouvrage en 2015 (Literart - Sao Paulo).
L'extraordinaire richesse du fond iconographie laissé par Edmond Fortier sur l'Afrique de l'Ouest du début du XXe siècle et tout particulièrement les images prises à l'occasion d'un voyage à Tombouctou effectué à partir de Saint-Louis du Sénégal où le photographe était installé.
Daniela Moreau (Rio de Janeiro, 1957) est historienne. Depuis 1995, elle fait des voyages de recherche sur le continent africain, spécialement dans le Sahel et en Afrique de l’Ouest. Elle vit et travaille à São Paulo, Brésil, où elle a fondé et coordonné pendant dix ans l’ONG Casa das Áfricas. Actuellement, elle dirige le projet Acervo África, qui met à la disposition des chercheurs une collection de plus de 1 500 pièces de culture matérielle africaine contemporaine. Depuis 2003, elle se consacre à la reconstitution et à l’étude de l’œuvre photographique d’Edmond Fortier (Celles-sur-Plaine, 1862-Dakar 1928). Fortier, photographe. De Conakry à Tombouctou est son premier livre traduit en français.
Odile Goerg est professeur d’histoire de l’Afrique contemporaine, université Paris-Diderot, et membre du cessma (Centre d’études en sciences sociales sur les mondes africains, américains et asiatiques).
Paulo Fernando de Moraes Farias est fellow de la British Academy, professeur honoraire au département d’études africaines et anthropologie de l’université de Birmingham, Angleterre ; auparavant à l’université fédérale de Bahia, Brésil (Centre d’études afro-orientales), à l’université de Dakar, Sénégal (ifan), et à l’université Ahmadu Bello, Zaria, Nigeria (département d’histoire).